Qu’est-ce qui nous séduit dans une peinture ? Et que séduit-elle en nous ? Car on peut aussi bien être séduit intellectuellement qu’affectivement, physiquement que socialement… Et ces différentes natures de séduction comportent des différences de degrés, d’intensités, voire de qualités. Sans doute est-ce une des raisons pour lesquelles certaines personnes s’accordent avec certaines peintures, pourquoi certaines peintures émeuvent certaines personnes et non d’autres. Aussi, convaincues qu’elles n’aiment que cela, autant sous l’effet de cette première impression que faute peut-être de se libérer d’un certain a priori qui sévit en elles à leur insu, ces personnes jugent négativement ce qu’elles ne regardent pas, ou plus, ou d’un œil affecté de ce préjugé. Ce cas touche le plus fréquemment ceux des amateurs dont la culture est façonnée, entretenue, dominée par ce qu’il est convenu d’appeler une peinture, plus précisément un art plastique contemporain obéissant non pas à une sensibilité, un sentiment, un enthousiasme, un amour, mais à une idée stylistique, un mode de penser, voire à une mode flatteuse de vanité et pourvoyeuse de renommée : une tentation à laquelle nombre de plasticiens succombent en qualifiant ce qu’il font par exemple d’art visuel libre ou d’art “phénoménal”… Or tout cela fait oublier, effacer, écarter, omettre l’essentiel, à savoir que toute peinture authentique n’est là – n’est née, ne vit – que pour se donner à qui se donne à elle sans l’intermédiaire d’un appareil décoratif, d’un appareil de séduction. Son image, sa figure suffit, son corps, sa chair, sa beauté.