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14 juin 2009 7 14 /06 /juin /2009 07:21
Noces

    On peut ignorer de quelle façon il procède, qu’elle est sa technique, sa cuisine, sa chimie (car s’en est effectivement une : le métier de peintre demande en effet un très long apprentissage ; contrairement à une idée reçue, vulgarisée pour flatter la pente de la facilité, ce métier ne s’improvise pas ; en revanche, lorsque le peintre improvise, c’est de la même manière que le musicien qui ne peut le faire que parce qu’il maîtrise son art en ayant appris son métier), ce qui compte, c’est l’émerveillemen pour peu que l’on soit sensible à ce qui est essentiellement humain, à l’immense train de tout ce qui s’ensuit.

    Il faut grandement plaindre les hommes qui restent devant un visage bouleversant (une beauté), indemnes d’émoi, exonérés de frémissement… À moins, en effet, de bénéficier d’une circulation du sang d’ophidien, il est impossible de ne pas participer activement à une expression esthétique authentiquement profonde, ou élevée, ce qui est synonyme. Or ce que donne à contempler Brémond, pourrait se comparer à un lac de montagne dans l’eau calme duquel viennent s’abreuver les cimes. Il a peint ainsi certains paysages dans la nature desquels on s’enfonce sans esprit de retour, tant le silence qui en émane est tissu de paix. On sort – si on en sort ! – de ces pays des merveilles avec l’âme percluse des plus adorables ecchymoses amoureuses ; et, de plus, avec l’irrépressible besoin d’emporter le tableau avec soi. Certains et certaines le font. Mais ils ne le peuvent que parce qu’ils se sont préalablement outillés du discernement approprié. Ou de l’art exquis de savoir vibrer par sympathie de volupté et réminiscence d’esprit, ce qui revient au même. Et lorsque l’on a connu une peinture capable de susciter une pareille émotion, il va de soi qu’on grille de s’y délecter à nouveau.

    Aussi ne faut-il pas s’étonner de la démarche de Georges Dureau. Ce chirurgien qui se destinait à une carrière de violoniste, ou ce violoniste du cœur humain qui sait le prix et le poids de l’âme, a, sinon au premier, du moins au second coup d’œil, vu de quoi cette peinture – et ce peintre – était faite. Il acquiert d’ailleurs des tableaux, des dessins : il fait partie de ceux qui se sont équipés d’un discernement, qui ne sortent (quand ils en sortent !) de la beauté qu’avec les indispensables ecchymoses d’amour, autrement plus indélébiles que le rouge à lèvres des baisers… Georges Dureau prend donc l’initiative de demander à Brémond s’il lui plairait de peindre le plafond d’une pièce – au rez-de-chaussée de sa grande maison – destinée à devenir son bureau. Si jadis certains personnages se donnaient d’âpres plaisirs à courre le loup (lorsque cette espèce animale hantait encore les bois, les champs et même le Gévaudan), Brémond accepte avec un emportement passionné de courir le risque de cette aventure.

    Mais auparavant, puis simultanément, il poursuit avec la même ténacité sa quête de l’expression la plus épurée, la plus simple, la plus proche de l’homme, celle capable de toucher ceux dont les entrailles sont directement reliées au cerveau (affublé de surnoms et pseudonymes : pensée, esprit, réflexion, conscience, cœur, raison, âme…) par une corde sensible. Il procède un peu comme faisait le poète PO Kui-yi (772-846) qui, dit-on, lisait ses vers à une femme illettrée, les corrigeant jusqu’à ce que celle-ci les comprît parfaitement. Pour Guy Brémond, une peinture  – une musique, un livre – qui nécessite un mode d’emploi, un glossaire, voire une explication ex professo, est une offense faite à la peinture et à la prodigieuse simplicité de l’intelligence. Aussi s’efforce-t-il à supprimer tout ce qui entrave la marche en avant. Mais atteindre la pureté, peindre comme on sait sourire, comme un premier baiser (qui tous devraient toujours être premiers), implique une sorte d’impératif catégorique : ne jamais se laisser infecter par l’affectation. Ou alors il faut trancher dans le vif : amputer, ou pire : décapiter.

Lien vers le site consacré à Georges Dureau :
http://www.georgesdureau.fr/default.html

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